Trois semaines après le début de la guerre en Ukraine, les répercussions se font déjà sentir au Moyen Orient et en Afrique du Nord. La faim menace cette région qui importe 50 % de son blé de Russie et d'Ukraine.
Alors que la région du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord (MENA) est déjà le théâtre de certaines des plus grandes crises humanitaires et de réfugiés au monde, l'interruption des importations de blé risque d'exacerber encore davantage les besoins humanitaires. Des pays comme l'Égypte, le Liban, la Syrie, le Yémen, la Jordanie et la Palestine, déjà frappés par l'inflation ou la crise humanitaire, sont les plus touchés.
"La guerre en Ukraine s'exporte dans la région MENA sous la forme de la faim. Il est choquant de réaliser qu’en 2022, des millions de personnes ne sont plus qu’à un pas de la famine et cela parce qu’elles sont affamées par les conflits et la violence, par les inégalités, par les impacts du changement climatique, par la perte de terres, d'emplois ou de perspectives et par un conflit à des milliers de kilomètres d'eux" alerte Muzna Shihabi, porte-parole de l’ONG CARE pour la région MENA.
En Égypte,85 % du blé et 73 % de l'huile de tournesol proviennent de Russie. On estime que la sécurité alimentaire de 105 millions de personnes à travers le pays est menacée.
Le Liban est fortement dépendant des importations de blé : 66% proviennent de l'Ukraine et 12% de la Russie.Il faut aussi noter, que depuis l’explosion du port de Beyrouth en 2020 et la destruction partielle des silos du port de la ville, il est désormais très difficile de stocker des graines.
" La guerre en Ukraine risque d’avoir des conséquences bien au-delà de ses frontières. Depuis plus d’une semaine déjà, les boulangeries rationnent le pain. Le prix d'un sac de pain a augmenté de 20% en quelques jours. Le Liban n'a que trois semaines de réserve de blé alors que deux millions de Libanais, en plus d'un million de réfugiés syriens et palestiniens, souffrent déjà de pénuries alimentaires ", prévient Bujar Hoxha, directeur de CARE Liban.
En Syrie, la guerre en Ukraine entraîne des prix records, alors que les gens n’ont déjà plus rien. Avant même la crise ukrainienne, un enfant sur cinq était déjà confronté à la malnutrition dans le nord de la Syrie, selon un rapport publié par nos équipes syriennes.
"Aujourd’hui, 15 mars, marque les 11 ans de la guerre en Syrie. 11 ans de souffrances et d’épreuve pour le peuple Syrien. S’ajoutent aujourd’hui les conséquences d’une autre guerre. Les gens doivent faire la queue pendant des heures pour avoir du pain, alors que pour la plupart, c’est le seul repas qu’ils pouvaient encore se permettre. Les gens ont d'abord dû renoncer à la viande, puis aux légumes et aux fruits. Si le pain est inaccessible, que mangeront ils ?" interpelle Jolien Veldwijk, directrice nationale de CARE Syrie.
Au Yémen, de plus en plus de personnes sont menacées par la famine. Cette année, 17,4 millions de Yéménites connaîtront des niveaux élevés d'insécurité alimentaire. C’est 7 % de plus que l'année précédente et ce chiffre devrait atteindre 19millions au cours de l’année, selon le dernier rapport sur les crises alimentaires. L'impact du conflit en Ukraine ne peut qu'aggraver cette situation, car le blé provenant d'Ukraine et de Russie représente au moins 40 % des importations au Yémen.
"Les conclusions du rapport sur les crises alimentaires pour le Yémen sont alarmantes. Mais le plus alarmant, c’est que finalement cela ne représente qu'une partie de la réalité que les Yéménites vont vivre dans les mois à venir car cette analyse a été faite avant la guerre en Ukraine et ses impacts. Aujourd’hui, les prix montent en flèche, les importations vont diminuer et les besoins humanitaires vont augmenter de manière exponentielle", alerte Aaron Brent, directeur de CARE au Yémen.
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